La diffusion automatique de l'heure de précision 


Ciel et Terre, Vol. 53, p. 27
Uccle, le 10 décembre 1936
Auteur : Arend, S.



Depuis le 28 octobre 1935, les Bruxellois ont le privilège de pouvoir se faire indiquer l'heure exacte par téléphone, grâce au fonctionnement d'une horloge parlante qui est installée au Bureau central téléphonique de Bruxelles, rue de la Paille.

Il suffit, pour les abonnés de langue française, d'appeler le n° 11.90.70, tandis que ceux de langue flamande doivent faire appel au n° 12.88.00.

Dès que la communication est établie ils peuvent entendre l'horloge parlante énoncer l'heure. Cette énonciation se fait toutes les dix secondes; ils entendent distinctement, par exemple à « 13heures, 14minutes, 40secondes » ces mots étant suivis du top musical qui situe avec précision le moment exact de l'heure énoncée. Le top horaire relatif à la seconde 50 a été supprimé afin de permettre d'annoncer la minute ronde; ainsi l'horloge prononcera, par exemple, « au troisième top, il sera exactement 13 heures, 25 minutes », puis on entendra successivement trois tops musicaux émis aux secondes 58, 59 et 60. La durée de l'écoute étant limitée a 1m.10s., on peut entendre les trois tops à la fin de chaque minute.

Dans une notice parue dans le Bulletin astronomique de l'Observatoire royal de Belgique, vol.ll, n°5, de 1936, MM.F.Moreau-et J.Verbaandert tracent d'abord un court aperçu historique de la diffusion automatique de l'heure telle qu'elle est réalisée dans certaines grandes villes comme Hambourg, Strasbourg, New-York, Paris; ensuite ils indiquent qu'en Belgique, depuis septembre 1933, l'Institut national belge de Radio diffusion émet des signaux horaires commandés par une pendule de l'Observatoire royal; enfin, ils décrivent l'horloge parlante et donnent des détails très intéressants concernant la manière dont se fait la synchronisation par une pendule de précision de l'0bservatoire royal.

Quoiqu’étant du système français Brillié, comme celle qui fonctionne à l'observatoire de Paris, l'horloge parlante de Bruxelles présente cette particularité d'être bilingue. Cependant la synchronisation est effectuée suivant des principes différents. A l'Observatoire de Paris, il est fait usage d'une pendule indépendante qui est remise à l'heure deux fois par jour, grâce à l'action d'un électroaimant avec courant variable situé en dessous du balancier.

On se rappelle la formule élémentaire qui donne la durée T de l'oscillation d'un pendule en fonction de sa longueur l et de la pesanteur g, savoir et l'on conçoit aisément qu'en ajoutant l'action de l'électroaimant à celle de la pesanteur, la durée d'oscillation T puisse être modifiée à volonté. A Uccle, MM. Moreau et Verbaandert ont imaginé un dispositif très ingénieux (réalisé par la firme « HCE » de Bruxelles) qui est décrit en détail avec figures à l'appui, et qui permet d'utiliser directement une horloge synchronisée par une pendule fondamentale ayant une marche tout à fait régulière. A la fin de leur notice, ils ont fait figurer un tableau des corrections de l'heure de l'horloge parlante; de ce tableau il ressort que la correction moyenne est de l'ordre de 0,1s., ce qui présente assurément une grande utilité, car l'horloge vient non seulement à point à d'aucuns qui ont besoin de connaître l'heure à la minute, par exemple, mais encore notamment aux usagers scientifiques et aussi aux horlogers qui se servent des tops horaires pour l'étude de la marche des chronomètres. L'état de l'horloge parlante est d'ailleurs déterminé chaque jour à l'Observatoire par enregistrement automatique sur un chronographe imprimant. Un bulletin de marche est établi de façon à mettre en évidence toute anomalie qui pourrait éventuellement se produire. Disons que depuis plus d'un an que fonctionne l'horloge parlante, il n'y a pas eu une seule interruption de synchronisation.

Alors que les demandes de l'heure dépassaient le nombre de 25.000 par jour au début, elles se sont stabilisées actuellement à 12.000 environ. A Paris, elles atteignent seulement le même nombre en moyenne. Comme la population de la capitale de France est quatre à cinq fois supérieure à celle de l'agglomération bruxelloise, il faut en conclure qu'à Bruxelles la demande est quatre à cinq fois plus élevée qu'à Paris. Nous laissons au lecteur le soin de se rendre compte des causes de cet état de choses qui ne manque pas d'éveiller une certaine curiosité.

Vu le succès de l'horloge parlante de Bruxelles, la Régie des téléphones examine actuellement la possibilité d'en étendre l'usage à toute la Belgique tout en accordant aux abonnés de province le bénéfice du tarif local des communications téléphoniques. Dès ce jour là, il est à prévoir que le nombre des demandes de l'heure de précision sera porté à 20.000 environ par jour.